05 avril 2008

Post-[évènement inconnu]


Et puis un jour il faut accepter la réalité, ne plus chercher à se réfugier dans une réalité dépassée, délavée, ne plus chercher à s’accrocher. Regarder l’évidence en face. On se rend compte que les souvenirs sont maintenant dénués d’affects, lisses, achromatiques, dépourvus d’émotions. Des mondes dans lesquels j’avais pris l’habitude d’y trouver du réconfort (au prix de nombreux sacrifices, soit) il ne reste que des images plates, belles mais insipides, attirantes mais en lesquelles il est impossible d’y rester.
Certes, je n’ai plus à sacrifier. Le prix du confort du souvenir était surtout lourd d’un point de vue du ressenti somatique. Il en fallait de l’énergie pour accepter ce revers de peau tapissé d’épines, ce péricarde clouté, ce cœur baignant dans l’acide, ces lames de rasoirs plantées dans chaque ventricule, abrasant la paroi musculaire un peu plus à chaque contraction.

Le passé est maintenant enclavé dans un cube de verre impénétrable et me voilà à détourner les yeux des souvenirs devenus d’une neutralité affective effarante, des corps démantelés totalement atones. Emoussement des affects, j’ai arrêté de chercher une prise quelconque sur ce temple trop lisse, trop régulier, trop connu, trop prévisible, trop tiède.

N’étant pas [encore] étiqueté bipolaire, je ne suis pas sous lithium mais c’est presque comme (si).
Ce n’est pas listé dans les effets collatéraux de Seropram. Les salauds ! je vais en faire part à la pharmacovigilance.

Malgré tout je n’ai pas perdu ce surplus d’énergie même s’il est toujours enkysté dans une membrane imperméable qui me circonscrit dans un espace réduit, étouffant. J’ai besoin de créer des conflits, de trouver des irrégularités dans le monde qui m’entoure pour m’accrocher, de provoquer, de défier, de batailler. Pour moi le combat peut être quelque chose de bénéfique, la compétition le meilleure moyen de créer cette atmosphère d’émulation saine, le meilleur moyen de tirer bénéfice de notre environnement.

Malgré tout la colère est toujours là. La haine aussi. Et le sentiment d’abandon, d’immense gâchis, l’ impression de mort prématuré, de lutte avortée, la déception face aux promesses non tenues et la rancœur, celle qui est née de ton désengagement, de ta fuite du combat, déserteur[e] face à la difficulté.

Malgré tout, chaque nuit, même celles accompagnées, je m’échine, me cyphose, n’offrant que mes vertèbres-carapaces aux regards indiscrets pour dormir dans les bras de ton fantôme. Et chaque matin la déception me tire de l’onirisme quand je réalise que ce n’est pas l’odeur de ta peau que je respire.
Une journée se définit par le laps de temps entre ces deux limites.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

"J’ai besoin de créer des conflits, de trouver des irrégularités dans le monde qui m’entoure pour m’accrocher, de provoquer, de défier, de batailler. Pour moi le combat peut être quelque chose de bénéfique, la compétition le meilleure moyen de créer cette atmosphère d’émulation saine, le meilleur moyen de tirer bénéfice de notre environnement. "
exactement d'accord

DC