30 septembre 2007

Rentrée littéraire


Hier je me suis déguisé en MC Jean Gab'1. Peu de gens m'ont reconnu. Manque de culture hip-hop, ivresse aiguë ? Je ne sais pas, en tous cas pas imputable à mon formidable déguisement et à mon flow - pur produit de la consanguinité, ultra filtrat de vitriol vendéen. Peut-être le miroir que je renvoyais aux gens, peut-être. Jogging, Air Jordan, DIM apparent, chaussettes remontées. Refoulement, agressivité, suite logique des choses : c'est possible de faire tourner la skyroulette ?

Hier donc j'eus l'idée prétentieuse de faire de ma rentrée littéraire un message. En hommage à l'adolescence et aux coups dans le vent, j'ai voulu imiter brest machin hélice et son chef d'oeuvre de la bibliothèque rouge des rebels de 15 ans
American Psycho. "Dédicace à la Terminale STT 3 du lycée MC Jean Moule'1, on se voit tous au concert de blink cent quatre-vingt deux.". Name dropping pour lui cover-drop pour moi.

Vincent Delerm aurait pu être une cible mais déjà beaucoup de monde lui crache à la gueule donc c'est moins marrant. C'est beaucoup plus jouissif de chier sur les étendards de la fausse contre-culture de masse type Larry Clarck, Che Guevara, Michael Moore.

Donc des livres. Rires, émotions, émerveillements, réflexions, ivresses, contraintes.












(merci Stéphane)



Ouais ma gueule.


21 septembre 2007

Moi et le monde

"Le fait que j'existe prouve que le monde n'a pas de sens. Quel sens pourrais-je trouver, en effet, dans les supplices d'un homme infiniment tourmenté et malheureux, pour qui tout se réduit en dernière instance au néant et pour qui la souffrance fait la loi de ce monde ? Que le monde ait permis l'exis­tence d'un humain tel que moi montre que les taches sur le soleil de la vie sont si vastes qu'elles finiront par en cacher la lumière. La bestialité de la vie m'a piétiné et écrasé, elle m'a coupé les ailes en plein vol et refusé les joies auxquelles j'eusse pu prétendre. Mon zèle démesuré, l'énergie folle que j'ai déployée pour briller ici-bas, l'envoûtement démoniaque que j'ai subi pour revêtir une auréole future, et toutes mes forces gaspillées en vue d'un redressement vital ou d'une aurore intérieure — tout cela s'est révélé plus faible que l'irrationalité de ce monde, qui a déversé en moi toutes ses ressources de négativité empoisonnée. La vie ne résiste guère à haute température. Aussi ai-je compris que les hommes les plus tourmentés, dont la dyna­mique intérieure atteint au paroxysme et qui ne peuvent s'accommoder de la tiédeur habituelle, sont voués à l'effondrement. On retrouve, dans le désar­roi de ceux qui habitent des régions insolites, l'aspect démoniaque de la vie, mais aussi son insi­gnifiance, ce qui explique qu'elle soit le privilège des médiocres. Seuls ces derniers vivent à une température normale ; les autres, un feu dévorant les consume. Je ne puis rien apporter au monde, car ma démarche est unique : celle de l'agonie. Vous vous plaignez que les hommes soient mauvais, vindicatifs, ingrats ou hypocrites ? Je vous propose, quant à moi, la méthode de l'agonie, qui vous permettra d'échapper temporairement à tous ces défauts. Appliquez-la donc à chaque génération — les effets se manifesteront aussitôt. Ainsi me ren­drai-je peut-être, moi aussi, utile à l'humanité !

Par le fouet, le feu ou le poison, faites donc éprouver à chaque agonisant l'expérience des der­niers moments, afin qu'il connaisse, dans un atroce supplice, la grande purification qu'est la vision de la mort. Laissez-le ensuite partir, courir terrorisé jusqu'à ce qu'il tombe d'épuisement. Le résultat sera, n'en doutez pas, plus brillant que celui qu'on obtiendrait par les voies habituelles. Que ne puis-je mener le monde entier à l'agonie pour purger la vie à sa racine ! J'y placerais des flammes brûlantes et tenaces, non pour la détruire, mais pour lui communiquer une sève et une chaleur différentes. Le feu que je mettrais au monde n'entraînerait point sa ruine, mais bel et bien une transfiguration cos­mique, essentielle. Aussi la vie s'accoutumerait-elle à une haute température, et cesserait d'être un nid de médiocrité. Qui sait si la mort même ne cesserait, au sein de ce rêve, d'être immanente à la vie ?

(Écrit en ce jour du 19 septembre 2007, mon vingt-deuxième anniversaire. J'éprouve une étrange sen­sation à la pensée d'être, à mon âge, un spécialiste du problème de la mort.)"

La messe est dite. Musique maestro.


07 septembre 2007

Lettre à Lou


Mon ami,

au moment où ton travail passé commence à porter ses fruits, tu es acculé par la calomnie, le mensonge, progéniture des jaloux. Tu essayes de supporter avec l’élégance qui te caractérise les railleries et quolibets de ces enfoirés de Sarkozystes.

Je t’ai vu hier, sur mon écran de télévision. Tu n’as pas perdu ton sens de l’humour, toi… En revanche lui, il n’en a jamais eu d’humour. As-tu vu Rachida Dati quelques jours auparavant, dans la même émission, répondre à la question sur quelle était sa blague préférée ? « Qu’est-ce qu’un canif ? C’est un p’tit fien.» Non mais je rêve, comment peut-on être président avec un humour aussi misérable ? Et dire qu’il nous méprisait lorsque nous rions à gorges déployées lorsque l’on se racontait la blague du vampire ou encore celle des deux putes siamoises. Cioran ne supportait que Camus lui donne des conseils, il disait : « Camus, l’homme à la culture d’instituteur, me donne des conseils, c’est incroyable ça ! » j’aime trop Camus pour faire une analogie mais il devrait savoir qu’avec sa formation juridique il est évident qu’il n’a aucun sens de l’humour. Les seuls moments d’humour véritables à l’Elysée doivent être quand lui et sa cour végétative admirative demandent à Bigard de déplacer les meubles afin de se gausser du désarroi euphorique du malvoyant Montagné. Quant à Rachida, parait-il qu’il lui a limé le cul pendant tout son séjour à la petite maison dans la prairie exception faite des moments où il racontait sa fameuse devinette et sympathisait avec Georges Walker [texas ranger] ruinant ainsi le peu qu’a fait Jacques (as-tu des nouvelles de lui ? j’ai surfé une fois avec lui à Biarritz cet été mais depuis plus rien, parait-il qu’il n’a trop pas le moral). Quand je pense à Alain, le seul compétent qu’il ait engagé et qu’il n’a su le conserver. Quel incapable !

Je t’ai lu pendant mes congés dans Marianne, sur une couverture où ton nom se dessinait aux cotés du parasite histrionique. Je suis sûr que, comme moi, l’ironie de la situation t’a arraché un sourire. Même si je n’attend pas un nouveau livre pour tout de suite (très beau titre d’ailleurs, me fait penser à notre Isidore Ducasse préféré) j’espère que cette collaboration se répétera. D’ailleurs, si tu y retournes, Jean-François Kahn a un Cd d’Arvö Pärt à moi et me doit 53 francs 50 (le parcmètre), Nicolas Domenach a mon exemplaire de la Vita Nova et Joseph Macé-Scaron ma collection de pin’s parlants d’Ophélie Winter (ceux sortis en 97, l’édition limitée).

De mon coté, je poursuis mes études médicales. Je suis externe maintenant, à temps plein. Difficile de trouver du temps entre l’hôpital et les apprentissages, d’ailleurs où apprendre ? Les cours facultaires ? Les référentiels nationaux ? Les livres ? Bref, il va me falloir un certain temps avant de trouver le modus operandi adéquat pour l’apprentissage. Mais mes contrariétés sont bien mineures comparées aux tiennes et sache, mon ami, que tu as tout mon soutien pour t’aider à traverser cette laborieuse et ténébreuse période.

Notre « relation » est difficile à vivre, évidemment la différence d’âge y est pour quelque chose et évidemment que nous aurons à supporter encore et toujours les regards inquisiteurs des badauds ne comprenant pas que deux cow-boys aimables et bien élevés puissent porter des pantalons en cuir et dormir ensemble dans le même lit. C’était déjà le cas à l’époque où il n’y avait rien de sexuel entre nous, alors maintenant … Même si je n’apprécie pas de me faire traiter d’homosexuel et encore moins de pédéraste à tire-larigot, je ne veux plus me cacher. De toutes façons c'est impossible, je ne pourrai pas, mes ressentis sont trop forts.

Je me souviens, un samedi de printemps nous étions allés à un concert dans une petite église de Montargis (45). Là, tu m’as glissé à l’oreille « L’œuvre de Bach est bien la preuve de l’existence de Dieu », nous avons alors esquissé un rictus étouffé dans ce silence religieux, nous les deux seuls athées au milieu de ces culs bénis et pourtant les deux seuls à apprécier la mise en musique du récit de saint Matthieu par Bach. Jésus annonce alors à ses disciples qu’il sera livré aux romains par Iscariot et crucifié pour Paques, aussi, après il annonce la résurrection du fils de l’Homme et parle de la nouvelle vie qui s’en suivra. Peu de temps après, je t’avais fait écouter la version utilisée comme thème de fin au film THX 1138, celle où l’ouverture de la passion selon saint Matthieu de Bach se mêle aux arrangements de Lalo Schiffrin quand Robert Duvall s’échappe de ce monde totalitaire et oppressant vers une vie nouvelle. Si j’évoque ceci c’est pour que tu ne perdes pas espoir, que tu t’accroches à cette promesse d’une Vita Nova.


J’aimerai aussi que tu te rappelles d’Hélène Grimaud jouant un allegretto de Beethov' à la MJC de Melun-Sénart (77) le jour de l'anniversaire de notre rencontre, un 32 Décembre …

… ou encore de ce morceau de Boccherini écouté à l’espace culturel Didier Gustin de Villejuif (94), nous sortions du cinéma où le film American Ninja 2 - le ninja blanc nous avait, à tous les deux, fait ressortir notre sentimentalité.


Tous ces souvenirs pour que tu ne perdes pas confiance, que tu crois en l’avenir. Des souvenirs devant.



Je t’aime.

Edouard Moria.


PS : j’ai deux places pour les Beastie Boys à la salle des fêtes de la Mothe-Achard (85), envoie-moi un message à mon adresse iMail : kiadukkkkikoléoqq[at]hotmail[point]com si tu es intéressé.