22 janvier 2008

Jubilations vers le Ciel


« Elle m’oubliera, elle sourira à un autre que moi, qui lui sentira les cheveux, qui lui pressera les mains, elle m’oubliera comme ceux, ceux qu’elle a connus avant moi, elle rira avec un autre que moi, qui lui écrira des poèmes et deviendra écrivain, elle m’oubliera comme eux, Hélène, elle pleurera avec un autre que moi, et mouillera les siens, elle mouille déjà les miens, elle m’oubliera comme eux, elle se mariera avec un autre que moi, qui lui dira des je t’aime, et pensera au lendemain, elle m’oubliera comme eux, qui l’ont déjà oubliée, elle est belle, elle m’éblouissait jusqu’au sommet, elle m’enlevait l’envie d’aller respirer l’air froid, de travailler, Hélène, lui dire une dernière fois que la faux me fauchera, Hélène, plongeon dans la terre, je vois tout dans un spasme, les tromperies avec un salaud sans charisme, ou, pire, avec charisme, tromperies de boulevard, les quiproquos cyniques, les mensonges odieux, des envies me sautent à la gorge d’assassiner le rival con qui l’amuse, Hélène, solitude, retourner dans ce pays, la solitude, je le connais bien, trop bien, retourner là-bas, au côté des frustrés, des vieux, des clochards, des romantiques et des ridicules, Hélène je pleure, je ne frime plus, je chiale comme une madeleine, c’est vraiment débile cette expression, oui, je souffre la vraie souffrance, comme dans les grands vrais romans, sauf que là ce serait un roman contemporain, avec des techniques ultramodernes pour décrire le monologue intérieur, sans ponctuations, non, pas le genre à rester seule très longtemps, nuit, néant, mort, mais je ne t’en veux pas, Hélène, je ne t’en veux pas, je n’ai pas le droit de t’en vouloir, je veux que tu sois heureuse, non, c’est faux, je suis malhonnête, je veux que tu sois malheureuse, Hélène, tu aimes les relations sexuelles, tu aimes la bite, tu suceras des glands étrangers un soir où, peut-être, je sangloterai comme un môme en pensant à toi, enfer, son corps à un autre, pour un autre, Hélène, ses gémissements divins, sans vergogne, comme ça, si rapidement, boum, de moi à lui, lui, quelle punition, je pleure, je ne sais pas ça si vous avez remarqué, mais depuis le début je ne sais faire que ça, et pourtant je m’étais remis en cause, j’avais changé, je pleure, un jour elle se mariera, elle se mariera, elle se mariera avec un autre que moi, oui, mais alors là je vais te dire, là, Hélène, tu n’as pas le droit le droit de faire ça, c’est salaud, c’est pas juste, c’est à la limite de l’incorrect, moi j’ai toujours été réglo avec toi, j’ai passé ma vie à être fou d’amour pour toi, je connais tes yeux par cœur, et puis j’aime tes deux seins, (…), mais non, je plaisantais, tu prends toujours tout au pied de la lettre, je n’en ai rien à foutre de ton physique, je t’aime pour toi, (…) »

Yann Moix, premier roman.
Superbe, brillant de lucidité, de passion(s) et sans doute le roman qui a su cataloguer en un minimum de pages le maximum des émotions que je pouvais ressentir au moment où je l’ai tenu entre mes mains pour la première fois.
Il n’y a pas que le christ qui ressuscite.
Sans ce roman, pas de goût pour la lecture donc pas de goût pour l’écriture donc pas de blog donc pas de piège à meuf donc pas d’émotion.
Donc, ou plutôt alors.
Alors merci.
Merci, Hélène, d’avoir gâché la vie de : Yann.
Tout ça c’est un peu grâce à toi, enfin, je ne sais pas pourquoi je te tutoie, pourquoi je m’évertue [« mes vers tuent » aurais-tu sûrement écrit] à employer une deuxième personne du singulier que je devrais, plutôt, substituer par une troisième personne de l’absence, de l’absence et du musellement ; il y a chez toi comme une sorte de science de musellement, tous ces cris étouffés, avortés, réduits au silence, ton attitude dictatoriale sur ce que tu ne voulais entendre : les cris des autres comme tes propres cris, Hélène. Et puis Blonde Redhead. Comme au début, Yann Moix et Blonde Redhead en alpha et omega. Le temps et la mémoire, la perte des souvenirs, Dali en fit un tableau avec des horloges molles, tout ça, et puis suffisamment d’auteurs plus ou moins brillants (dont peut-être moi-même) se sont étendus là-dessus pour que je ne réitère pas l’opération. Je sais juste que le survivor des souvenirs, le dernier, celui qui sera encore là sur mon lit de mort et celui que j’emmènerai, avec moi, chaque nuit, (Hélène), sera celui de ton visage la première fois où nous avons fait l’amour, des larmes des joie se laissaient couler sur tes joues et tes yeux, tes yeux, eux, s’agrippaient au ciel. Le ciel des jubilations.




7 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonsoir Ed', serait-il possible que tu me donnes le nom de l'interprète et le titre de cette chanson s'il te plait?

Spirale a dit…

Blonde Redhead (c'est marqué dans le texte bordel !), le morceau c'est "chié e non é" sur l'EP Mélodie Citronique.

Anonyme, tu engraisses ta culture musicale et deviens une personne de bon goût grâce à moi alors tu pourrais au moins te présenter.

Anonyme a dit…

Ed',
il est vrai que c'est marqué dans le texte mais détestant Yann Moix je ne me suis pas attardé dessus . Tu m'en excuseras bien sûr car je sais que ton âme est remplie de bonté.

Mon identité? Qui sait? peut être un jour explorerons-nous des anus en tandem digital et vaseliné.

Tendrement, je t'embrasse.

Spirale a dit…

Oh oui oh oui, embrassons-nous ; la vie trompe tellement nos attentes que l'on se réconforte comme l'on peut.

Hélas j'ai bien peur que tu sois un homme.

Et mes textes, tu les aimes mes textes ?

Anonyme a dit…

Et bien pour être franc, tes textes les plus récents ne sont plus trop à mon goûts.

Plus assez de profondeur, trop de vulgarité bestiale mal habillée.

Comme s'il y avait eu un changement dans ta vie... Comme un parfum de rupture ou quelque chose comme celà.

Qu'en penses-tu Eddy?

Je t'en prie, Mon Amour, écris-moi vite, je me languis déjà de toi.

PS: dans l'intimité d'un anus, nos doigts se ficheront bien de savoir si nous sommes deux hommes ou bien un homme et une femme.

Spirale a dit…

Je te comprends, j'estime moi-même que j'atteins mon maximum en octobre-novembre de chaque année.

J'ai cherché un retour à quelque chose de plus animal, primaire, moins sophistiqué donc, en un sens, c'est un bon point si tu l'as ressenti.

Bien qu'intégrant en leur sein une grande part de fictions mes récits récents laissent transparaître la haine, la rancoeur, l'amertume et la déception qui m'habitent en ce moment. Ces derniers temps je publiais pour parler plus que pour partager quelque chose (et c'est mal). D'où un faux-poste ou les 3/4 sont une citation du fabuleux premier roman de Yann, parce qu'il décrit exactement mes ressentis du moment.



Je n'aime pas trop les anus. Les vagins non plus mais on peut fermer les yeux lorsque l'on pénetre ces derniers. Fermer les yeux à l'introduction d'un vagin peut même te faire passer pour un romantique.

Anonyme a dit…

je te lis, je te vois, je t'observe. Je reste persuadé(e) que tu en dis plus que que tu ne veux bien le croire.

Tres franchement tu m'inquiètes, je me fais du souci pour toi.

Prends soin de toi.
Tendrement.